Article à la signature de d'Elisabeth Petit.
Savez-vous parler globish ?
Jean-Paul Nerrière, ancien cadre international, a codifié dans un livre un anglais simplifié accessible au plus grand nombre : le « globish ». Le but : se faire comprendre aisément dans le monde entier.
« Un anglais de portier d’hôtel ». Candidat, à l’époque, au concours d’entrée à l’Ecole Centrale, Jean-Paul Nerrière n’a pas oublié le verdict sans appel d’un membre du jury quelque peu sceptique face à son accent « frenchy ». Pourtant, cette prononciation peu académique, améliorée il est vrai depuis, n’a en rien entaché la carrière brillante de ce fils d’officier de Marine, finalement diplômé de la célèbre école en 1963. Aujourd’hui retraité à Saint-Romain-en-Viennois, dans le Vaucluse, Jean-Paul Nerrière compte à son actif vingt-sept ans de bons et loyaux services chez IBM, couronnés par un poste de vice-président en Europe, puis aux Etats-Unis.
Mais ces fonctions de cadre international lui ont permis de tester son anglais basique, de Montréal à Pékin, en passant par l’Afrique et l’Amérique du Sud. Rompu aux réunions d’affaires fréquentées aussi bien par des Finlandais, des Italiens que des Chinois, Jean-Paul Nerrière a gardé en mémoire les silences consternés et les sourires polis qui suivaient parfois les propos des anglophones de naissance, comme les Irlandais ou les Californiens. « Au Japon ou à Hong-Kong, mes collègues américains, qui intimidaient tout le monde avec leur aisance et leur maîtrise de la langue de Shakespeare, n’étaient pas toujours compris. Alors qu’avec mes phrases simples et répétées deux fois, je n’avais aucun problème ».
« Moi, avec mes phrases simples, j’étais compris du Chili au Japon… »
Fort de cette expérience, Jean-Paul Nerrière a décidé, il y a peu, de codifier ce langage allégé dans un livre (*) et sur un site Internet. Baptisée « globish », contraction de « global english », cette forme simple d’anglo-américain se veut avant tout un outil de communication universel, et non une langue, avec tout ce que cela suppose de richesses. « Il s’agit en fait de l’organisation et de la classification du dialecte parlé de nos jours par 88 % de la population dans le monde », explique-t-il.
Ni « petit nègre », ni « anglais de sa Majesté », le « globish » est constitué d’un glossaire de 1.500 mots courants et d’une syntaxe rudimentaire, complétés de procédés de formulation qui permettent à chacun de se faire comprendre par tous, sans ambiguïté et quel que soit son pays d’origine.
« Bien sûr, pour échanger sur des concepts philosophiques ou métaphysiques, il faudra toujours recourir aux finesses de la vraie langue. Mais pour le reste, le globish suffit amplement », estime son vulgarisateur, qui se défend de faire ainsi le jeu des partisans du tout anglais. « Au contraire, le globish écorne sérieusement l’hégémonie de la langue anglaise ! Par ailleurs, son essor pourrait permettre au français de se repositionner, en affirmant toute l’étendue de sa richesse et de ses spécificités ».
Le globish semble en tout cas avoir de beaux jours devant lui. Dans un rapport publié en octobre, Claude Thélot, président de la Commission consultative sur l’éducation, préconisait en effet d’inculquer aux jeunes Français « un anglais de communication internationale », concept qui va comme un gant au globish de Jean-Paul Nerrière En attendant, l’ancien dirigeant peaufine sa méthode. En avril, il publiera même un second livre sur ce sujet. Et si, vous aussi, vous vous mettiez au « globish » ?
Elisabeth Petit
(*) Don’t speak english, parlez globish ! Editions d’Organisation.
www.jpn-globish.com